Focus sur J. A. Reincken : 1722–2022

Hambourg, 24-26 Novembre 2022

Appel à communications

Le 24 novembre 2022 marque le 300e anniversaire de la mort de Johann Adam Reincken (1643-1722), organiste de l’église principale St. Katharinen de Hambourg, figure centrale du Collegium Musicum et cofondateur de l’Oper am Gänsemarkt. Reincken est entré dans l'histoire comme une figure emblématique de l'école d'orgue d’Allemagne du Nord, figure dont l'influence sur Jean Sébastien Bach « ne peut être que difficilement surestimée » (Emery & Wolff 2001).  L’œuvre personnelle de Reincken – tant artistique que théorique – n'a toutefois reçu qu'une attention limitée, circonscrite à des études spécialisées. En partant du contexte socioculturel, en passant par la culture matérielle, jusqu'aux écrits théoriques et aux compositions elles-mêmes, ce colloque se fixe pour but de mieux comprendre l'œuvre de Reincken et de redéfinir, sur cette base, sa place dans l'histoire musicale et culturelle locale et européenne.

Section 1 - Contexte socio-culturel

La vie culturelle de la ville hanséatique de Hambourg connaît des bouleversements importants au milieu du xviie siècle. Thomas Selle, nommé cantor au Johanneum en 1641, contribue à l’amélioration qualitative et à la diversification stylistique de la musique d’église. Sur la base de ses propres catégories, son successeur, Christoph Bernhard, défend l'introduction d'éléments du stylus modernus dans la musique liturgique. Les organistes se saisissent également de ce style et l'intègrent, sur le plan théorique et pratique, dans la tradition contrapuntique d'Allemagne du Nord.  Le stylus phantasticus qui en résulte devient un facteur identitaire et fait de la musique d'église hambourgeoise – portée par des personnalités emblématiques comme Reincken – une figure de proue au-delà des frontières régionales. 

Le Collegium Musicum, fondé en 1660, acquiert une importance décisive dans ce contexte en tant que lieu de rencontre entre instrumentistes, chanteurs, chœurs professionnels et amateurs. Maillon entre l'autonomisation de la musique d'église et l'émergence d'un répertoire vocal profane, l’académie prépare le terrain pour de nouvelles formes musicales qui allient théâtre, poésie et chant (Gauthier 2009, 79-88). L'Oper am Gänsemarkt, dont  Reincken est le cofondateur avec Gerhard Schott et Peter Lütjen en 1678,  en constitue le premier lieu d’exécution. Cette section situe la personnalité, l'œuvre et l’influence de Reincken dans leurs contextes socio-culturels et les éclaire sous cet angle.  

Section 2 - Culture matérielle

Les recherches sur la culture matérielle en lien avec Reincken ou son entourage immédiat portent principalement sur l'iconographie et l'organologie. Les points de départ importants dans ces domaines sont, d'une part, la redécouverte du tableau Häusliche Musickszene (1674) de Johannes Voorhout et, d'autre part, la reconstruction du grand orgue de l'église St. Katharinen. Ces objets constituent, avec d’autres, des points d'ancrage pour des études sur l'apport de Reincken dans les domaines de la musique à usage domestique et de la musique sacrée. 

Cette section vise à approfondir les résultats des recherches précédentes dans une perspective interdisciplinaire. On s'interrogera sur la signification des représentations iconographiques en rapport avec la pratique musicale ou sur la manière dont la construction des instruments et les particularités acoustiques des lieux ont pu influencer l'œuvre de Reincken. Le tableau Häusliche Musickszene est censé représenter non seulement Reincken, mais aussi Buxtehude et Theile.  La pratique musicale domestique entre amis compositeurs semble liée aux activités du Collegium Musicum et peut être retracée dans l'histoire musicale de Hambourg jusqu’au xviiie siècle.  L'orgue historique de St. Katharinen a été construit pour une cathédrale en briques d'Allemagne du Nord et agrandi sous la supervision de Reincken sans jamais être remanié par le facteur d’orgue Arp Schnitger.  Outre les études sur la pratique de la composition et sur la performance, les contributions de cette section pourront discuter le concept d'archéologie sonore.

Section 3 – Écrits théoriques

Depuis le début du xxe siècle, le volume X de l'édition monumentale Sweelinck livre un accès privilégié aux règles de composition rédigées par ce maître et enrichies par ses disciples directs et indirects, dont Reincken. L’intention de l’éditeur de reconstituer la « forme originelle de la théorie compositionnelle de Sweelinck » (Gehrmann 1901) a eu toutefois pour conséquence durable de reléguer la contribution de Reincken à l'arrière-plan. L'étude de cet apport reste aussi incomplète parce que l'un des manuscrits autographes de Reincken  (D-Hs ND VI 5002) n'a, jusqu'à récemment, jamais fait l'objet d'une édition moderne alors que ses contenus se distinguent des autres sources. 

À partir d'études centrées sur le théoricien et tenant compte de l'ensemble des sources conservées, cette section a pour objectif d'apporter un nouvel éclairage sur la théorie musicale de Reincken. Outre les champs thématiques du contrepoint et de la fugue qui ont fait l’objet d’études antérieures (notamment Walker 1986, Schäfertöns 1998, 2000), les contributions tiendront compte aussi d'autres points de théorie moins explorés, comme la métrique, les modes et la transposition. Il s'agira de préciser la genèse et la transmission de la théorie musicale de Reincken. Ceci passe par la reconstitution du réseau intertextuel dans lequel elle s’inscrit et par l’identification de ses objectifs et motivations. Si les manuscrits de Sweelinck ont été interprétés de Gehrmann jusqu'à Braun (1994) comme le résultat de situations d'enseignement, la théorie de Reincken ne peut être ramenée à cette seule dimension didactique et mériterait d’être examinée à nouveaux frais sur le plan des intentions et des contenus. 

Section 4 Œuvres musicales 

Cette section se concentre sur deux aspects des compositions de Reincken qui ont soulevé des problèmes à différents niveaux dans la recherche antérieure. La plupart des œuvres n'ayant pas été transmises sous la forme d'imprimés, la philologie musicale a fourni un apport essentiel à travers l'édition de différents ensembles de compositions. Les œuvres pour instruments à clavier ont dû toutefois attendre jusqu’en 1967 pour être publiées dans l’édition complète de Willi Apel.

Le décalage entre, d'une part, les allusions biographiques fréquentes à Reincken dans les travaux sur l'histoire de la musique et de la composition et, de l'autre, la disponibilité relativement tardive de sources musicales fiables, se manifeste de manière similaire dans le domaine de l'analyse musicale. Si le nom de Reincken apparaît dans presque toutes les études qui traitent de la genèse et de la diversification du style de Johann Sebastian Bach, l'examen analytique des compositions de Reincken n'en est qu'à ses balbutiements. La fonction médiatrice souvent attribuée à Reincken dans l'histoire du style et de la composition entre les xviie et xviiie siècles n’est, en règle générale, qu’insuffisamment étayée. Les communications de cette section traiteront des problèmes d'attribution et de datation des compositions. Elles cerneront également sur le plan analytique la place de la musique de Reincken dans l'histoire du langage musical et de la composition.

 

Références citées

  • Braun, Werner, Deutsche Musiktheorie des 15. bis. 17. Jahrhunderts. Zweiter Teil von Calvisius bis Mattheson, Thomas Ertelt et Frieder Zaminer (éd.), Darmstadt, Wissenschaftliche Buchgesellschaft, 1994 [« Geschichte der Musiktheorie », vol. 8.2].
  • Emery, Walter et Wolff, Christoph, « Bach, Johann Sebastian », Grove Music Online, en ligne : https://doi-org.accesdistant.sorbonne-universite.fr/10.1093/gmo/9781561592630.article.6002278195.
  • Gauthier, Laure, L'Opéra à Hambourg (1648-1728): Naissance d'un genre, essor d'une ville, Paris, PUPS, 2009.
  • Gehrmann, Hermann (éd.), « De ‘Compositions-Regeln », Werken van Jan Pieterszn Sweelinck, vol. 10, s’Gravenhage/Leipzig, Marinus Nijhoff/Breitkopf & Härtel.+
  • Reincken, Adam, Collected Keyboard Works, Willi Apel (éd.), [s.l.], American Institute of musicology, 1967 [« Corpus of early Keyboard music », vol. 16].
  • Schäfertöns, Reinhard, Die Fuge in der norddeutschen Orgelmusik : Beiträge zur Geschichte einer Satztechnik, Francfort s. M., Paris, Berlin, P. Langer  [« Greifswalder Beiträge zur Musikwissenschaft », vol. 5].
  • Schäfertöns, Reinhard, « ‘Es schickt sich aber eine fuga oft beßer...’: Zur Entwicklung der Fuge in der norddeutschen Orgelmusik des 17. und frühen 18. Jahrhunderts », Musikkonzepte–Konzepte der Musikwissenschaft, Wolfgang Ruf (éd.), Kassel, Bärenreiter, p. 219-224.
  • Walker, Paul, « From Renaissance ‘Fuga’ to Baroque Fugue: The Role of the ‘Sweelinck Theory Manuscripts’ », Schütz-Jahrbuch,  7/8 (1985/1986), p. 93-104.

 

Format des propositions

Les propositions pour des communications de 20 minutes en allemand, en français ou en anglais, s'inscriront dans un ou plusieurs des champs thématiques esquissés. Le colloque se déroulera sur place, dans différents lieux à Hambourg. Dans des cas exceptionnels, les contributions pourront être diffusées en visioconférence dans les salles du colloque (sans audience en ligne). La participation est gratuite.
 
Les soumissions sont à envoyer sous la forme d'un seul fichier pdf à roberta.vidic(at)hfmt-hamburg(dot)de et incluront les informations suivantes :

  • Nom et, le cas échéant, affiliation institutionnelle
  • Coordonnées
  • Résumé (300 mots au maximum)
  • Courte biographie (100 mots au maximum)

 
La date limite de soumission est le 9 janvier 2022. Les propositions seront sélectionnées à la fin du mois de février 2022.

 

Comité scientifique

  • Achille Davy-Rigaux (IReMus Paris)
  • Michael Heinemann (HfM Dresden)
  • Théodora Psychoyou (IReMus Paris)
  • Ivana Rentsch (Universität Hamburg)

 

Comité d'organisation

  • Christophe Guillotel-Nothmann (IReMus Paris)
  • Francesca Mignogna (IReMus Paris)
  • Jan Philipp Sprick (HfMT Hamburg)
  • Roberta Vidic (HfMT Hamburg)

 

Institutions partenaires

 


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