Portrait de Liqaa Marooki

L'IReMus donne la parole à ses doctorantes et doctorants. Dans le portrait du jour, c'est Liqaa Marooki qui nous présente ses travaux et revient sur son parcours. 

Son projet de thèse est intitulé Le rôle des musiciens qawwâl dans le pèlerinage Jamâ'îyah de la communauté yézidie du nord de l'Irak, Sorbonne Université, ED Concepts et Langages/IReMus. Il est mené sous la direction de Jérôme Cler (IReMus), en co-direction avec Jean Lambert (Museum National d’Histoire Naturelle).

Pouvez-vous nous décrire brièvement le sujet de votre thèse ?

L. M. : Mon sujet de thèse porte sur le rôle des musiciens qawwâl dans le pèlerinage Jamâ’îyah de la communauté yézidie du nord de l’Irak. L’objectif de ma thèse est de mettre en lumière la musique religieuse yézidie sur laquelle très de travaux de recherche ont été effectués. La forme instrumentale de cette musique est transmise exclusivement par les qawwâl qui sont les joueurs de deux instruments considérés comme sacré, le tambour sur cadre daf et la flûte oblique shibbâba. Le manière dont les qawwâl jouent et chantent produit plusieurs particularités formelles : hétérophonie, décalage temporel, écart tonal entre la voix et l’instrument qui est souvent séparé d’une quarte ou quinte, quelquefois d’une seconde. La seule interprétation que les qawwâl m’ont donnés sur ces particularités formelles est qu’étant de nature divine, cette musique n’est pas faite pour être comprise. À côté de la musique vocale, les qawwâl accompagnent aussi des danses religieuses pratiquées dans le pèlerinage : Sama, une danse d’origine soufie réservée aux dignitaires religieux et Govand, une danse ouverte à toute la communauté. Dans ces deux danses est représentée la communauté yezidie fortement hiérarchisée. Sama présente la rigidité de la hiérarchie de la communauté d’une manière spectaculaire tandis que Govand assouplit cette rigidité en éliminant les différenciations entre les danseurs. Mon travail de thèse est fondé principalement sur les séjours de terrains que j’ai pu effectuer depuis 2019 au sein de la communauté yezidie qui est une communauté endogame dont la religion fait partie des religions indo-iraniennes et mésopotamiennes anciennes.

Comment en êtes-vous venue à travailler sur ce sujet ?

L. M. : Lorsque je suis venue en France pour faire mon doctorat j’avais prévu de travailler sur les chants de mariage de mon village situé dans la plaine de Ninive au nord de l’Irak. Mais j’ai dû changer le sujet après mon séjour du terrain effectué en 2019. J’ai découvert à ce moment que les musiciens avec lesquels j’avais prévu travailler avaient dû quitter successivement le pays suite aux événements dramatiques de 2014. Cependant une rencontre inattendue avec les qawwâl a changé mon itinéraire. Je précise qu’avant de venir en France j’ignorais totalement leur existence, bien que leur village était seulement à 22 km du mien. Ils restaient très discrets car leur religion a été menacée à plusieurs reprises par des campagnes de persécution, la dernière ayant eu lieu en 2014.

Quel est l’apport de l’IReMus dans votre travail de thèse ?

L. M. : L’IReMus m’a été d’un grand soutien dans mon travail ethnographique. À ce titre, je remercie énormément le laboratoire. Comme mes séjours de terrain ont été effectués principalement en Irak, qui est considéré comme une zone rouge, je ne pouvais pas obtenir une bourse de mobilité de la part de mon université. Pour cette raison je suis partie en Irak à titre personnel. Mais en ce qui concerne la communauté yezidie du diaspora l’IReMus m’a aidé financièrement pour effectuer des séjours ethnographiques qui m’ont permis d’avancer sur mon sujet. Au niveau de la formation, j’ai pu profiter des séminaires et des cours organisés par l’IReMus. Le laboratoire m’a également permis de financer un stage sur les techniques de tournage sur le terrain.

Quels sont les enjeux importants de votre thèse, que va-t-elle apporter à la communauté scientifique ?

L. M. : Le fait que la musique religieuse yezidie a été très peu étudiée jusqu’ici représente l’enjeu majeur de ma thèse. Pour cette raison je m’appuie principalement sur mes analyses des enregistrements que j’ai pu effectuer pendant mes séjours de terrain. Comme mon sujet de thèse est inédit, il va apporter beaucoup de lumière sur les interprétations musicales interdites yezidie ce qui peut ouvrir la voie à des recherches plus approfondies dans un second temps.

Vos projets futurs ?

L. M. : Après mon doctorat, je pense continuer dans le domaine de l’enseignement supérieur en reprenant mon poste à l’université de Mossoul en Irak. Au niveau de la communauté yezidie j’aimerais les sensibiliser sur certains points forts de leurs interprétations. J’aimerai aussi profiter de mes études doctorales pour développer ma carrière de chanteuse que j’ai commencé en 2006 en Irak, et en France depuis 2021.


Tutelles

Nous contacter

Institut de recherche en Musicologie (UMR 8223)
Bibliothèque Nationale de France
Quai François Mauriac
75706 PARIS
 CEDEX 13
Secrétariat : +33(0) 1 53 79 37 10
par courriel

Sorbonne Université
Centre Univ. Clignancourt
salle 524 (informatique), bureau 531 (direction)

2, rue Francis de Croisset 75018 PARIS
Tél : +33 1 53 09 56 00

Centre Sorbonne
Salle Pirro
1, rue Victor Cousin 75005 PARIS
Tél : +33 1 40 46 22 11

Maison de la recherche
Salle 312 et 313
28, rue Serpente 75006 PARIS
Tél : +33 1 53 10 57 00

Connexion utilisateur