ANR-Sociétés innovantes, intégrantes et adaptatives (DS08) 2017
A partir des années 1970, les orchestres ont recruté de plus en plus de musiciennes. Malgré cette tendance les femmes restent sous-représentées parmi les musicien.ne.s d’orchestre. Ces inégalités peuvent être le fruit de processus discriminatoires. Mesurer la discrimination exige de pouvoir isoler l’effet des facteurs discriminatoires de l’effet des différences de compétences individuelles. Le recrutement de musicien.ne.s a ceci de spécifique que l’on peut apprécier la qualité de la candidature sans voir la personne. Dans certains orchestres, le passage d’un tour à l’autre se fait à l’aveugle : la personne réalise alors sa performance derrière un paravent. Cette méthode vise initialement à limiter les phénomènes de collusion élève-professeur lors des recrutements, mais ce faisant elle constitue potentiellement un outil de diversification des profils des personnes recrutées et donc un moyen de lutter contre les discriminations. En utilisant le terrain expérimental du recrutement des musicien.n.es dans les orchestres français, le projet PRODIGE propose de répondre aux questions suivantes : les auditions à l’aveugle permettent-elles de mettre au jour des processus discriminatoires à l’encontre des femmes ou d’autres catégories sous représentées ? Cette procédure de recrutement est-elle efficace pour lutter contre les discriminations ? Dans quelle mesure l’utilisation de procédures à l’aveugle modifie-t-il les profils des candidat.e.s au concours et le « vivier » des candidat.e.s ? Pourquoi et comment les procédures de recrutement ont-elles évoluées au fil du temps dans les orchestres ? Quelle place est faite à l’égalité femmes-hommes dans le secteur de l’interprétation musicale ? Quel est l’effet de la composition des jurys et des règles de vote sur le profil des personnes sélectionnées ?
Cette recherche se situe au croisement de plusieurs questionnements puisqu’il s’agit de mesurer les discriminations dans des procédures de sélection et d’embauche, d’évaluer les effets voulus et non voulus des recrutements à l’aveugle pour réduire ces phénomènes et d’analyser la construction des inégalités de sexes dans le secteur de l’interprétation musicale. Elle s’appuiera sur deux axes : l’un quantitatif portant sur la mesure de la discrimination et l’analyse de l’effet de la procédure de recrutement sur le profil des personnes recrutées et des personnes candidates, et l’autre portant sur une approche qualitative des procédures de recrutement dans les orchestres, sur les aspects socio-historiques du mode de recrutement dans les orchestres et sur l’égalité professionnelle au sein des orchestres. Quatre sources de données seront constituées : une base de données individuelles issues des concours ; une base de données historiques sur la féminisation des orchestres ; une base de données sur la composition des jurys et sur les différentes procédures de concours ; et enfin une source de données qualitatives réalisée à partir d’archives et d’entretiens. Le projet est porté par deux équipes permettant de couvrir les compétences nécessaires pour mener à bien le projet : compétences en statistiques, en études de genre, sur l’analyse des discriminations, en musicologie et sociologie de la musique.
Cette recherche permettra notamment de documenter un point encore peu exploré : l’effet des procédures de sélections sur le vivier de candidat.e.s. Cette réflexion est nécessaire dans un contexte où se développent les pratiques à l’aveugle, du CV anonyme au testing. Les résultats alimenteront les réflexions concernant les politiques de lutte contre les discriminations en lien avec les acteurs œuvrant dans ce champ, pouvoirs publics et Défenseur des droits notamment. Les résultats permettront en outre d’éclairer les réflexions dans le domaine de la culture et le secteur de la musique, notamment quant au rôle des orchestres dans la Cité, et en ce qui concerne le métier de musicien.n.e d’orchestre et ses missions en termes de citoyenneté.
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